Je ne m’étais pas destinée à être entrepreneure…

 

Introduction 

Du monde de l’entrepreneuriat, je ne connaissais qu’une façade : la plus médiatisée, en lien avec le monde des start-ups où croissance rapide, agitation et Paris  riment avec succès tout en côtoyant de près burn-out et négligence de soi. 

 J’étais tout de même très attirée par cet univers qui laissait transparaître une certaine liberté : la Silicon Valley me faisait rêver, la promesse d’un modèle similaire en France me faisait vibrer – j’ai même eu l’occasion de visiter Station F à ses tous débuts – , je comprenais certains concepts,  j’y adhérais partiellement grâce à la mise en ligne de conférences organisées par The Family. Tout en restant sur mon ordinateur, je goûtais déjà à ce qui plus tard allait être ma réalité. 

Avant d’aller plus loin, je souhaite revenir aux bases, à qui je suis, à mon éducation et à mes expériences de vie qui m’ont amené jusqu’ici.

    1. Mes Bases, ce qui m’a façonné. 

    Peut-être que certains ne le savent pas encore mais je suis Guadeloupéenne et très fière. Être issue d’une culture insulaire, qui plus est franco-caribéenne est une bénédiction pour moi. Certes, il y a des inconvénients à évoluer sur une île – isolement, problèmes d’eau, dépendance sur certains pans économiques, cherté de la vie, manque d’autonomie politique, culture différente et souvent incomprise depuis l’Hexagone, etc – mais au fond, c’est une chance incroyable de grandir sur ce bout de territoire offert par la Terre. 

    Oui une chance car le noyau familial compte (et va au-delà de la fameuse cellule papa+maman), il y fait effectivement bon vivre et les atouts naturels – connus et reconnus à l’international – ne manquent pas : plages, rivières, forêts, villes, campagnes, volcans, soleil, vent mais aussi cuisine locale digne de grands restaurants étoilés. 

     

     

     

    Cela a aussi été une chance car peu importe les rêves que j’avais, ma famille m’a toujours soutenue. Et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle j’ai pris plaisir pendant mes études en Hexagone et à l’international ; sans connaître la finalité et les enjeux de la voie dans laquelle je m’étais engagée, j’étais déjà heureuse (et un peu naïve) d’être là, de vivre pleinement chaque moment. 

    Tout était fluide, je passais chaque étape avec travail certes mais surtout avec succès. Les portes s’ouvraient les unes après les autres car j’étais une bonne élève – peut-être un peu trop par moment – . Si j’ose le dire aujourd’hui ainsi, c’est parce que les études et le travail avaient pris une place trop importante dans mon quotidien, au détriment de ma vie personnelle. En même temps, pour moi il y avait un enjeu très fort qui était de réussir (professionnellement) à tout prix pour rendre fier mes parents, pour que tous les efforts n’aient pas été faits en vain, pour gagner beaucoup d’argent et parce que, de là où je viens, il y a ce devoir de réussir

     

     

    2. Quel était le problème ?  

    Le problème c’est le “à tout prix” ou comme on dirait maintenant “quoiqu’il en coûte” et Dieu seul sait que j’en ai bavé sans jamais me plaindre jusqu’à ce que je fasse non pas un mais deux burn-out à 5 ans d’intervalle. 

     

    Je ne sais pas si vous vous imaginez mais quand cela m’est arrivé, j’ai eu un flash : une image de moi assise au volant d’une voiture, regardant dans le rétroviseur et ne voyant rien ou que du vide. Comme j’avais tout construit en fonction de ma vie professionnelle, que j’avais tout misé dessus, le jour où tout s’est effondré j’étais mal en point. Je ne savais plus quoi faire, je me sentais vidée, épuisée, faible, honteuse mais surtout plus du tout connectée à un monde dans lequel j’avais tant essayé de fitter. 

     

    Comme j’ai dit plus haut, je ne m’étais pas destinée à être entrepreneure mais le dernier burn-out vécu m’a poussé dans une autre dimension de ma vie : celle de prendre soin de moi tout en jouissant de la vie

     

    Du coup, en 2022, une fois libérée de mes obligations professionnelles (c’est-à-dire une fois le salariat quitté, non pas sans peine), j’avais le champ libre.

     

     

    Pourquoi je dis que l’entrepreneuriat a changé ma vie

    Et ben tout simplement parce que j’ai dû tout réapprendre de zéro, ça peut faire peur et faire mal à l’égo. En effet, après 10 ans de salariat où on acquiert des compétences, on progresse, on devient expert dans son domaine et on a parfois la rémunération qui suit, redevenir débutant peut être inconfortable

     Aujourd’hui, je suis capable de mettre des mots sur ma première année en tant qu’entrepreneure. J’ai identifié les points suivants qui ont fait évolué mon état d’esprit et ma manière de vivre tout simplement : 

    1. Le champ libre, l’introspection 
    2. Les peurs provoquant l’indécision dans le lancement
    3. Les difficultés de l’entreprenariat 
    4. Les  joies de l’entreprenariat

     

    1. Le champ libre et  l’introspection

     Une fois libérée et délivrée  (la Reine des Neiges n’est jamais bien loin) de mes fonctions de salariée, je me suis retrouvée “concombre sans graine” comme on dit chez moi en Guadeloupe. En gros, je me suis retrouvée plus ou moins sans rien et je devais tout reconstruire.  J’avais certes le champ libre mais je me posais plein de questions : qu’allais-je faire ? de quoi avais-je besoin ? de quoi avais-je envie ? était-ce réalisable ? était-ce légitime de vouloir telle ou telle chose ? 

     

    La première chose que j’ai faite, c’était me ressourcer, prendre soin de moi et me f**tre du regard des autres

    Il y a souvent cette pression quand on quitte le salariat (ou tout autre forme de stabilité financière) à se dire qu’il faut retrouver un projet ou un emploi le plus rapidement possible par peur des “qu’en dira-t-on?”, parce que la société n’aime pas les gens qui ne font rien, parce que la société se définit par rapport à son activité professionnelle, pourquoi donc ??? 

    Du coup, je suis partie en Guadeloupe me ressourcer, prendre des bains réguliers de mer et de rivière et juste profiter pour flâner. Ce temps  à flâner était aussi une façon de rentrer progressivement en introspection et de me laisser aller à la rêverie…cela m’a fait un bien fou. C’est de ces moments de détente que j’ai autorisé des rêves enfouis à émerger

    • Travailler dans les pierres précieuses et notamment sur les problématiques liées à l’éthique de cette industrie
    • Avoir ma propre plateforme d’expression personnelle pour aider les autres à grandir, à évoluer, à se dépasser
    • Ecrire et raconter des histoires à travers des livres, des audios ou des films

     

    2. Les peurs irrationnelles provoquant de l’indécision

    Tous ces projets à foison m’excitaient (et m’excitent toujours d’ailleurs). Mais plus je me projetais, plus certaines peurs apparaissaient : 

    • Peur de manquer une opportunité si je faisais tel ou tel choix (aussi bien pour les projets que pour le lieu de vie – quitter Paris n’a pas été une décision facile)
    • Peur d’échouer et donc d’avoir fait autant d’efforts pour rien
    • Peur de ne pas être légitime sur tel ou tel projet, avoir le syndrome de l’imposteur
    • Peur de réussir, d’être connu et reconnu pour mon travail 
    • Peur de réussir financièrement et de gagner beaucoup d’argent
    • Peur de ne pas pouvoir payer mes factures, ne pas pouvoir gagner de l’argent, ne pas pouvoir être à l’aise financièrement

    Comment ai-je fait taire ces peurs ? 

    En passant à l’action tout simplement. 

    Je ne le redirai jamais assez mais le passage à l’action est clé pour avancer dans un projet même quand on n’a pas toutes les variables en main ou qu’on a peur. Rester paralysé n’a jamais permis de grandes avancées. 

     

    Qu’ai-je donc fait concrètement ? 

    • J’ai choisi de me concentrer sur un projet dans un premier temps : celui des pierres précieuses. J’ai vraiment consacré ma première année d’entreprenariat à ce projet en allant sur différents salons professionnels et en rencontrant du monde. C’était magique ! 
    • J’ai dédramatisé le fait d’échouer en me disant qu’au pire des cas, j’aurais appris quelque chose. Et surtout que cet “échec” ne me définit pas, c’est juste une indication que le chemin que je prenais n’était peut-être pas le bon. 
    • J’ai adopté une autre posture professionnelle : en ayant travaillé 10 ans dans le business dont 8 aux achats, j’étais devenue compétente dans mon domaine d’expertise. Le problème c’est que quand on se lance dans un projet, il y a beaucoup de choses à déconstruire pour reconstruire, à réapprendre. L’idée ici c’est de quitter la posture de l’expert (qui pense savoir tout) pour adopter la posture de l’exploratrice, beaucoup plus confortable ! C’est une belle manière de vaincre le syndrome de l’imposteur ; si vous voulez en savoir plus, pourquoi ne pas faire un tour vers cet article du blog Fric au Féminin, qui donne quelques conseils. 
    • Cette peur de réussir, d’être connu, de gagner beaucoup d’argent a été présente pendant des années : j’ai grandi dans un monde où “vivons heureux, vivons cachés” est très présent. Sans compter toutes les histoires de gens connus qui du jour au lendemain se sont retrouvés riches matériellement, talentueux dans leur domaine mais trahis par leurs proches. Ça fait réfléchir … mais au final, doit-on vraiment vivre pour les autres ? Qu’est-ce qui est le plus important ? 
    • Peurs financières : il y en a des tonnes et j’aimerais le traiter dans un prochain article. La seule chose à retenir, c’est que cela m’a permis encore plus de creuser ma relation à l’argent et de la pacifier. 

     

    3. Les  difficultés de l’entreprenariat

    • La solitude : c’est un vrai fléau chez les entrepreneurs ou indépendants, surtout quand on a connu l’inverse durant des années. A titre personnel, je le vis assez bien car je suis une louve solitaire mais il est vrai que des fois, j’ai besoin d’une aide extérieure et ce n’est plus aussi naturel d’aller voir un “collègue” car il FAUT avoir des collègues, se créer un nouveau réseau et cela prend du temps. Sans compter que travailler avec son ordinateur isole aussi. Dans ce cas, il ne faut pas hésiter à aller de temps en temps dans des espaces de coworking ou des cafés ou d’avoir une activité à côté (sport, loisirs, culture, association, etc) pour juste rencontrer du monde. 
    • Les émotions : quand on est entrepreneur, on vit un ascenseur émotionnel au quotidien, à la journée, à l’heure voire à la minute près. On peut être très content d’avoir obtenu un client puis la seconde d’après se sentir nul car on n’a pas fait 10k de CA mensuel comme le voisin de Linkedin. Cet ascenseur est aussi très présent car on est seul, donc on n’a parfois moins de recul sur nos victoires. Que faire dans ce cas ? Respirer, aller marcher, être plus gentil avec soi-même
    • Les comparaisons : c’est tellement naturel pour l’être humain de se comparer mais en même temps, cela peut être tellement toxique pour soi. Chacun a son chemin de vie et parfois, le mieux à faire est de se déconnecter de tous les réseaux qui nous rendent moroses. 

     

    Bon, j’espère que vous êtes toujours là car mon but n’est pas de vous freiner dans votre envie d’entreprendre peu importe la forme que cela prendra d’ailleurs.  

    Les joies de l’entreprenariat !

    Il y a aussi des joies à cette aventure : 

    • L’organisation du travail : vous êtes désormais à même de gérer votre propre planning. C’est assez intéressant car vous n’êtes plus obligés de faire du 9-18h ! Vous pouvez décider de vos plages de travail en fonction de vos pics de productivité, de vos impératifs personnels. A titre personnel, je fais des siestes chaque après-midi car j’ai toujours su que je n’étais pas concentrée à ce moment (même à l’école). 
    • Le réseau : plus vous entrez dans votre projet, plus vous vous ouvrez aux autres, plus vous faites des rencontres qui peuvent changer votre vie (un associé, un collègue entrepreneur, un partenaire de vie ou tout simplement des amis). Le meilleur moyen est d’oser rentrer en contact avec les autres, de faire des cafés visio, qui sait ce qui se passera ? Et surtout, n’ayez pas pas peur du rejet. 
    • Les compétences développées en dehors de son coeur de métier : c’est assez impressionnant mais depuis que je suis entrepreneure, je suis multicasquette. Cheffe d’entreprise, entrepreneure, community manager, copywriter, coach, acheteuse, marketing digital, commercial, etc, cela peut faire peur mais en vrai, c’est hyper intéressant d’apprendre comment fonctionne un business. Bien évidemment, j’aime dire que l’étape d’après est de déléguer le plus rapidement possible ce qui prend beaucoup de temps, qui a peu de valeur ajoutée si fait par soi-même. J’ai aussi appris à être efficace ou plutôt non perfectionniste : “better done than perfect” et c’est vrai. J’envoie mon service, mon produit qui bien sûr est améliorable. Cela me rappelle un article que j’ai lu sur le blog Fric au Féminin” qui parle de la loi de Pareto (20/80) appliquée à la vie quotidienne, je vous invite à y aller pour mieux comprendre comment l’appliquer dans votre vie. 
    • La liberté !!!! C’est vraiment ma joie préférée tout simplement parce que c’est une de mes valeurs et donc ce modèle me permet d’incarner qui je suis. Ce n’est pas simple tous les jours d’avoir autant de libertés car on pense souvent que cela veut dire de faire tout et n’importe quoi. Je dirai non, pour moi la liberté est un mélange d’amour pour soi et de discipline (ou, oui, de la discipline !) . 

    En conclusion, l’entreprenariat est entrain de changer ma vie et ma manière de penser. 

    A l’heure où je vous parle, je me suis lancée dans un deuxième projet, j’ai quitté Paris sans savoir où j’aimerais vivre plus tard, je suis dans le flow, je monte en compétences sur mes projets, je fais la paix et l’amour tous les jours avec mes finances mais surtout je respire la liberté, celle que j’ai choisie. 

     

    Après, je suis consciente qu’on ne peut pas tous faire ces choix de vie mais il est important de savoir que l’entreprenariat – comme vu à la télé ou sur les réseaux – n’est pas la seule forme pour entreprendre. 

    En effet, des alternatives existent comme monter un side project ou un hustle business tout en étant salarié, faire de l’intraprenariat (c’est-à-dire être entrepreneur au sein de son entreprise), développer un projet associatif culturel ou sportif (tout n’est pas lié à l’argent ou plutôt au fait de gagner de l’argent) ou tout simplement ne rien faire et profiter de la vie.

    Chacun son truc !

    Voilà, c’est fini pour aujourd’hui ! 

    Cet article est beaucoup plus long que les autres car il s’agit surtout d’un témoignage avec de belles leçons de vie. 

    J’espère que vous saurez apprécier ce format. 

    Pour information, j’ai aussi écrit cet article dans le cadre d’un événement interbloggueurs organisé par ma collègue du blog « Fric au féminin ».

    Le thème était « Changer de vie pour aller mieux ?  » et cela m’inspirait énormément par rapport à ma transformation actuelle.  

    A très bientôt 

    Related Articles

    Related